Venus les beaux jours et la chaleur qui les accompagne, les rares points d’eau de Paris sont pris d’assaut. On se tourne facilement vers la Seine, parfois le canal Saint-Martin. Et depuis quelques années, les regards se fixent aussi sur le canal de l’Ourcq et le Bassin de la Villette. Pourtant, pour ceux qui, comme moi, habitent le XIXème, il a toujours été là.
Le Bassin de la Villette, c’est un peu le poumon du XIXème. Pendant quelques kilomètres, notre vue ne se heurte plus à des rangées d’immeubles, nos oreilles ne sont plus agressées par le bruit incessant des voitures et notre nez n’inhale plus autant d’air pollué. Cette sensation d’espace libère tout Parisien de son quotidien, et les weekends d’été, c’est en bande qu’ils viennent occuper les berges avec leurs pique-niques.
Pourtant, c’est le reste de l’année, quand on peut voir les pavés du trottoir, que le Bassin est vraiment vivant. Quand j’arrive sur le canal par la rue de Rouen, je débouche sur le parc : il y a toujours des enfants qui s’amusent ou au moins deux joueurs de ping-pong invétérés. En remontant vers le MK2 Quai de Seine, je croise toujours d’autres promeneurs, parfois accompagnés de leurs chiens. Face au cinéma, les gens attendent leur séance en papotant assis par terre. Et bien sûr, comme partout dans Paris, d’autres encore sont installés dans les deux cafés adjacents.
La Place Stalingrad offre un magnifique panorama sur ce lieu de vie.
Curieusement, les amateurs de pétanque semblent préférer s’installer sur le Quai de Loire. Il est vrai que le soleil y est présent plus longtemps. Lorsque l’on joue et que les jours sont courts, on profite du plus de lumière possible. En hiver, ils ont toutes la place qu’ils veulent. En été, il faut se battre pour défendre son terrain. Me voilà arrivée au Pavillon de Canaux et au Paname à nouveau plongée dans l’inévitable et permanente foule venue boire un verre.
Sur le dernier segment de mon trajet, qui me ramène rue de Rouen, il y a les péniches qui accueillent les visiteurs pour des spectacles, un dîner ou simplement un café. Sur la terre ferme, des groupes de petits vieux occupent les bancs et se racontent des anecdotes, pendant que les familles se promènent.
Tout cela a tendance à disparaître l’été. Les quais sont si noirs de monde qu’on perd l’envie d’aller s’y promener. Même avant que Paris Plage ne s’installe, les Parisiens en tout genre se retrouvent au bord de ce point d’eau. À croire qu’ils s’y sentent presque à la campagne.
L’endroit a changé depuis que je le connais. Quand j’étais petite, c’était le lieu privilégié des promenades dominicales des familles du XIXème.
À mesure que j’ai grandi, la fréquentation a changé. Les parents et les poussettes ont laissé place aux groupes et aux bouteilles en verre. À mon avis, les deux cinémas y sont pour beaucoup, tout comme Paris-Plages qui s’est étendu au Bassin en 2007.
Les familles et les amateurs de tranquillité retrouvent leurs droits une fois le mauvais temps de retour et les jours de semaines. Quand j’étais petite, je me disais que j’aimerais habiter au bord du canal quand je serai grande. Aujourd’hui, je n’en suis plus si sûre.
Texte, photos et son : Margotte le Goff
Article réalisé dans le cadre du programme Le Bruit de Ma Ville