L’interview « Paye ta Ville » avec Pépite

Signé sur le label indé parisien microqlima, le duo Pépite, composé de Thomas au chant et d’Édouard à la composition, sort son EP Renaissance le vendredi 29 septembre. On y retrouvera notamment le morceau Reste avec moi et son clip aux couleurs des nuits d’été d’un Paris tropical, à la fois rêvé et psychédélique. Si Edouard et Thomas avaient déjà déclaré leur amour aux navires chavirants et aux hiéroglyphes dans leur premier EP Les Bateaux sorti à l’automne 2016, ce vendredi, dans notre PTV hebdomadaire, ils chantent les éloges des villes fleuries de banlieue parisienne, des orangers de Séville et des quais parisiens.

Vous habitez où ?

Thomas : Entre Abbesses et Clamart, chez mes parents, là où y’a mon studio.

Edouard : Dans le 13ème à Paris et à Chaville où j’ai mon studio. En fait, on alterne entre Paris et banlieue tous les jours. Là on est à Chaville, au soleil, à côté de la forêt.

Vous y êtes depuis combien de temps ?

T. : Ça fait 1 an. Avant j’étais dans le 13ème.

E. : Depuis un an. C’est la première fois que j’habite à Paris. Avant j’étais en banlieue à Meudon, une ville très fleurie que j’apprécie beaucoup. Je crois qu’il y a 4 ou 5 étoiles sur le panneau fleuri.

Votre premier souvenir marquant dans votre ville ?

E. : Je dirais que mes plus grands souvenirs sont ceux de la sortie du collège. On allait ensuite traîner entre potes à la gare de Meudon, surtout le vendredi soir, avant d’aller au skatepark. Perso, je faisais pas de skate mais de la guitare donc j’ambiançais un peu le skatepark. Quand j’allais sur les rampes c’était pour faire des cascades. À Paris, je dirais que c’est les premiers concerts avec mes amis quand j’avais 16 ans, notamment Emergenza. Je suis aussi très content depuis que je fais les liens entre les stations de métro quand je marche.

Le quai central de la Gare de Meudon avec au-dessus le bâtiment voyageurs.

T. : Je dirais les parties de foot au parc Rothschild quand j’étais à Boulogne. Ce sont mes premiers souvenirs de jeunesse dans ma ville. On allait jouer le samedi et le dimanche. À Paris, ça doit être le Jardin des Plantes avec ma grand mère. Sûrement le meilleur endroit de Paris ! Les petits chats dans le formol, la grande baleine, la ménagerie, et puis le Jardin alpin. 

Est-ce que vous trouvez que votre ville a changé ? 

T. : Tout a un peu changé à Boulogne. Les villes de banlieue quand tu grandis ça devient un peu plus chiant parce que quand t’es petit tu as les parcs et tes amis mais sinon ça peut faire ville dortoir. Maintenant, on est plus attiré par la grande ville, à part quand il fait beau pour faire des barbecues.

E. : Tant que y’a la forêt et des fleurs je retrouve ma banlieue de quand j’étais petit. L’architecture a un peu évolué dans un mauvais sens je pense par contre, avec des maisons carrées, sans charme, toutes noires et bizarres.

T. & E. : On en profite pour faire un retour au concept de la ville fleurie avec Chaville et notre studio qui est juste à côté de la forêt. Le studio, la forêt et les barbecues.

T. : Pour finir, sur Paris, je dirais que ça a changé : y’a plus vraiment de quartiers populaires. Tout est un peu uniforme. Mais Paris reste Paris, une ville magnifique où on aime être.

Sur la terrasse de la maison de Chaville

Quel est votre endroit préféré dans votre ville ?

T. : Le Jardin des Plantes et la place Edouard VII pour boire un café. C’est à côté de l’Olympia, dans une petite rue piétonne. Y’a souvent des enfants qui jouent au foot. C’est assez calme alors que le quartier ne l’est pas. Il y a aussi un grand théâtre qui fait des pièces de boulevard très connues.

E. : Les étangs à Meudon au milieu de la forêt. Il y a des petits pontons, des canards… C’est très bucolique.

Une expression de votre ville que vous aimez bien ?

T. & E. : Une belle expression qu’on utilise entre les gens de Clamart et Meudon, surtout avec notre bande de potes du lycée (même si elle commence à se populariser), qui est « je suis petit » ou « je suis bien gentil » : quand tu es fatigué ou ivre, tu rapeticis et tu retombes en enfance tellement t’es gentil.

La ville où vous aimeriez habiter ?

T. : Moi j’aime bien Paris, j’y suis bien. Peut-être Rome ou New York. Rome parce que c’est la seule ville jumelée avec Paris. Il y a d’ailleurs une maxime qui dit : Seule Paris est digne de Rome. Sinon New York parce que c’est un peu la folie.

E. : Je pense que ce sera un coup de coeur. Donc j’ai du mal à te dire. Pour l’instant ça m’est pas encore arrivé. Joker du coup.

« Seule Paris est digne de Rome. »

Des bruits de la ville qui vous ont influencés dans vos productions ?

Thomas : Parfois j’écoute des morceaux dans le bus et j’entends la sirène de pompiers et souvent ça s’harmonise bien.

Edouard : J’avais enregistré le morceau d’un saxophoniste dans le métro, magnifique. Je l’ai mis sur le morceau d’un pote. Ça rendait bien.

Comment s’appellerait votre ville imaginaire et à quoi est-ce qu’elle ressemblerait ?

T. : J’ai joué pas mal à Sim City quand j’étais petit donc je vais m’en inspirer un peu. La ville s’appellerait « Clamart City ». Il y aurait un centre avec des immeubles assez hauts mais assez beaux. Un centre d’affaires en gros, et au bout, il y aurait des grandes maisons avec des champs autour. Ce serait entre la grande ville et la campagne.

E. : « Eddychouxland » : Paris sans voitures, des minis-scooters électriques et des boulangeries partout. Du sable sur tous les quais, toute l’année, tout le temps. Paris plus dans le sud aussi. Paris tropical. Plutôt Paris à la place de Marseille en fait.

Votre ville cauchemar ?

T. : Paris, ville rêvée et cauchemar à la fois.

E. : Paris ce matin c’était vraiment le cauchemar : pas de métro, pas de bus, des manifs, des CRS… j’ai mis deux heures à arriver au studio…

Ce qui vous apaise en ville ?

T. : L’anonymat. J’adore être dans une rue et que personne ne te connaisse. Quoi que tu fasses personne ne se rappellera de toi.

E. : Les bords de Seine. Se poser au bord de l’eau. Thomas a écrit une chanson dessus qui sera dans le prochain EP d’ailleurs.

Ce qui vous énerve en ville ?

T. : Les moteurs et les sirènes. Comme tout le monde je crois.

E. : Les râleurs aussi ! Mais y’en a partout, pas qu’en ville.

Ville de jour ou ville de nuit ?

E. & T. : Paris la nuit, Meudon le jour.

Le lieu urbain où vous voudriez tourner un clip ?

E. & T. : On a écrit un morceaux qui s’appelle Hiéroglyphes et on voulait absolument tourner le clip dans la réserve égyptologique du Louvre.

La petite habitude que vous avez quand vous êtes dans votre ville ?

E. : Moi je fais beaucoup de détours. Souvent pour découvrir des choses, je m’arrête à des arrêts avant ou après ma destination. L’idée c’est de pas faire le même chemin tous les jours.

T. : J’essaye toujours de prendre la ligne qui m’arrange pour ne pas faire de changements même s’il faut beaucoup marcher. J’étudie patiemment mes trajets de métro. Je peux avoir rendez-vous à Stalingrad par exemple, et je vais m’arrêter à Pigalle parce que ça me saoule de prendre la ligne 2.

Et dans une ville étrangère ?

T. : L’habitude à prendre est de ne pas avoir de programme parce que c’est chiant. Il faut découvrir à pieds…

E. : …et être armé d’un appareil photo jetable !

Pépite, «Renaissance» EP 2017 à paraître le 29 septembre 2017 – crédit Julie Oona

Le type de personnes que vous aimez observer à une terrasse de café ?

T. : Ah, ça c’est drôle ! Ce qui me fait rire parfois c’est les gens qui parlent beaucoup trop, à un moment tu vois leur interlocuteur lâcher la conversation et faire des « mmh, mmh… ouais ». Parfois aussi, si tu restes un peu longtemps à une terrasse, tu peux voir des gens s’échanger des choses dans des poubelle. Hier j’en ai vu un qui a laissé un paquet qu’un autre mec est venu récupérer dans la poubelle 10 minutes plus tard.

E. : pas vraiment des types de personnes mais j’aime bien observer des gens en général et je pense que beaucoup de gens font le jeu pour s’occuper de s’imaginer la vie des gens qu’ils croisent, leurs vacances et plein d’autres choses.

Plutôt multitude ou solitude ville ?

T. : Multitude.

E. : Solitude. J’aime le calme. Mais j’ai besoin des deux. Faut être un peu équilibré.

Le Jardin alpin du Jardin des Plantes à Paris © MNHN – Frédéric Dumur/Jean Leborgne

La ville où prendre sa retraite ?

T. : Séville en Espagne parce qu’il y est fait beau et chaud, et qu’au printemps ça sent l’oranger dans toute la ville.

E. : Saintes en Charente-Maritime. Mon papa a une maison pas loin. Je le vois bien faire sa retraite là bas et j’espère y faire la mienne aussi, plus tard.

Une ville ou un quartier où marcher la nuit ?

T. : Meudon, la nuit. C’est trop bien. Je suis rentré à 3h du mat de Meudon pour aller vers Clamart (30 minutes de marche environ) : les lumières sont orangées et j’ai croisé quatre personnes et deux voitures : il y avait une sorte de solitude agréable dans cette balade.

E. : Ouais c’est vrai. Y’a toujours des petites aventures quand on rentre le soir. Plein de choses à visiter !

Une musique sur la ville ?

T. : Il est 5 heures, Paris s’éveille de Jacques Dutronc (1968) !

E. : Rues de mon Paris, de Serge Gainsbourg avec Dalida (1963).

Un film sur la ville ?

T. : Manhattan, Woody Allen (1979)

E. : Les 400 Coups de François Truffaut (1959)

Un livre sur la ville ?

E. : Le Spleen de Paris de Baudelaire (1855).  

T. : Bel-Ami de Maupassant (1885)… les grands boulevards.

Votre ville rêvée pour jouer un concert ?

E. & T. : Hier on a fait un concert sur un bateau qui faisait une croisière sur la Seine, c’était déjà pas mal. Il y a aussi L’Olympia, avec les lettres rouges… Mais ce sera pour plus tard.

Votre endroit dans le monde préféré pour voir un live de musique ?

E. & T. : On aurait bien aimé voir Pink Floyd à Pompéi.

Une ville dont l’esprit artistique vous influence particulièrement ?

T. : Paris pour toute sa littérature et New York pour sa musique.

E. : Bruxelles aussi qui fourmille de partout.

Si vous deviez améliorer quelque chose dans la ville dans laquelle vous vivez, ça serait quoi ?

T. : Les transports… trouver des solutions pour que ce soit plus agréable pour tout le monde.

E. : Plus de poubelles aussi pour plus rien jeter par terre.

Si vous deviez remplacer un monument de votre choix par quelque chose, ce serait quoi ?

T. : J’aime tous les monuments à Paris et j’ai pas envie de les changer.

E. : C’est vrai, y’a eu beaucoup d’efforts pour faire ces monuments.

T. : J’aurais aimé que la Bastille existe encore par contre ! Voir à quoi ça ressemblait.

Une question que vous auriez aimé qu’on vous pose au sujet de la ville ?

T. : J’en ai plusieurs : pour ou contre Uber ? Plutôt rive gauche ou rive droite ? Plutôt Montmartre ou Tour Eiffel ?

E. : Pour, mais c’est trop cher. Plutôt rive gauche : c’est plus près de notre banlieue. Plutôt Tour Eiffel mais trop de sécurité maintenant, c’est moins charmant, y’a des voitures-béliers… donc Montmartre.


Premier extrait, single « Sensations »  

« Renaissance EP », sortie le vendredi 29 septembre 2017  

En concert le 24 octobre 2017 à la Maroquinerie.

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Photo de couverture : Baptiste Perrin

Propos recueillis par Fiona Forte


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Fiona Forte

Originaire de l’Essonne, Fiona construit sa réflexion autour de la ville à travers des projets visuels et éditoriaux pensés pour donner la parole aux habitants. Après des études de lettres et de sciences politiques, elle se tourne vers le journalisme et l’organisation de manifestations culturelles, en se spécialisant dans les enjeux urbains. En parallèle, sa pratique photographique s’enrichit au contact des pays qu’elle parcourt, notamment ceux du continent américain, et de reportages en région parisienne. Elle se consacre actuellement à l’écriture d’un documentaire vidéo sur le carnaval de rue brésilien et à la réalisation d’une série photographique sur les liens entre masculinité, féminité et séduction.

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Publié par
Fiona Forte

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