John Hamon a le visage du bon copain, de celui qui nous est familier. Avec son sourire franc, ses sourcils en accent circonflexe, ses lunettes rondes en métal et ses cheveux bruns en bataille, on a l’impression de le connaître. Vous l’avez d’ailleurs sûrement déjà croisé, au détour d’une rue parisienne. Car, depuis 2001, il a affiché son visage des dizaines de milliers de fois à Paris (et jusqu’en Patagonie !). Mais qui se cache derrière ce portrait ? Et d’ailleurs, John Hamon existe-t-il vraiment ?
Une photo prise il y a plus de 20 ans
Sur ce portrait, John est lycéen. A l’époque, il se photographie avec quelques amis et emprunte, pour l’occasion, les lunettes d’un copain. Une fois développée, cette photo d’identité le captive.
« Quand elle est sortie, elle était étrange… Je me reconnaissais sans me reconnaître. Y’avait un truc un peu mystique, un truc dans l’expression, dans la position qui m’a interpellé. Il s’était passé quelque chose. »
Il décide donc d’en « tirer » quelque chose.
Armé d’un balai et d’une photocopie A4 en noir et blanc, il l’affiche pour la première fois en 2001, dans les rues du 13ème arrondissement de Paris. John est alors âgé de 19 ans.
Tombé dans le chaudron de l’art quand il était petit (grand-père artisan, père dessinateur-amateur de talent, frère styliste, visites de musées à la pelle le dimanche, etc.), il veut devenir artiste. Il intègre donc les Beaux-Arts de Tarbes, dans le Sud-Ouest de la France. Il n’y restera que deux ans. Leur moule était trop étroit pour lui…
Lui veut faire de l’Art autrement.
Mais, en deux ans, John a le temps de mûrir sa démarche : s’afficher pour se promouvoir, se promouvoir pour devenir artiste.
Car, pour lui : « c’est la promotion qui fait l’artiste ».
Un portrait devenu signature
Depuis maintenant 16 ans, John placarde cette affiche dans les rues de Paris.
De nuit ou au petit matin, vêtu de sa tenue de travail (polaire noire sur pantalon tacheté de peinture, casquette noire sur la tête, gants de latex), armé d’un balai et d’un seau de colle, il affiche seul pendant plusieurs heures, au hasard de ses déplacements.
« Il n’y a pas besoin de grand-chose, si ce n’est de la volonté et de l’énergie » affirme-t-il.
Sa démarche d’artiste est brute et va à l’essentiel.
Il part d’un rien : « le degré zéro de l’art ». D’une photo signature, il laisse sa trace, tel un homme préhistorique qui apposerait sa main dans une grotte.
En s’affichant ainsi dans les rues de la ville, John se rend public. « C’est aussi pour exister que tout ça est fait » confie-t-il.
Artiste-afficheur, doublement militant, il diffuse aussi ses idées avec ce portrait. Lorsqu’il a commencé à placarder d’ailleurs, l’affichage était surtout réservé aux politiques. La pratique a tendance à se démocratiser aujourd’hui et c’est John Hamon qui devient candidat ! Lors de la projection de son portrait sur le Palais de Tokyo dont vous pourrez retrouver très prochainement la vidéo sur Noise, un passant d’une soixantaine d’année nous confiait :
« Si John Hamon s’était présenté aux élections présidentielles j’aurais directement voté pour lui. John, c’est comme la famille. »
Âgé de 35 ans, John continue à semer son portrait là où il passe : simples photocopies en noir et blanc puis affiches en couleur, illustrations, peintures, installations… Jusqu’à le projeter sur la Tour Eiffel ou, plus récemment, sur le Palais de Tokyo.
Toujours le même visage. Jusqu’à la fin de ses jours.
« Tout ça va suivre son cours, le temps d’une vie. » glisse John, sourire et mystère en coin…
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