Comment une étudiante en L1 a-t-elle pu monter une association « écolo » dans sa fac à coup de flyers ? Comment fonctionne une association sans hiérarchie ? Quelles actions mettre en place pour sensibiliser l’administration et les étudiants d’une fac ? On a rencontré Lorène Mouchet, fondatrice de Lunivert Etudiant à Paris I, pour en savoir plus sur l’histoire et les projets de l’asso.
On est une association écologiste, créée en décembre 2014 à mon arrivée à Paris I. Je l’ai montée de A à Z avec d’autres étudiants de Paris 1 sensibles à ces questions. Notre premier défi a été de définir ce qu’on voulait défendre, par-delà l’étiquette “écologie”. Il y a une multitude d’enjeux environnementaux, économiques, sociaux, politiques qui sont directement liés à ce sujet.
Résultat, on s’est d’abord fixé comme objectif la sensibilisation, en se disant que nos actions pouvaient toucher de très nombreux élèves. On a commencé par des partenariats avec d’autres associations, en co-organisant par exemple une collecte de vêtements pour les migrants de Calais avec « You Are », ou des jouets à Noël. On a continué en mettant sur pied des conférences. La première, c’était en amont de la COP 21 avec ATTAC. Ensuite on en a fait une autre sur les enjeux des ZAD (leur dimension historique, leur création, les enjeux actuels, etc.). Récemment, on en a organisé une avec WARN (We Are Ready Now) sous forme de jeu pour faire découvrir différentes initiatives environnementales. Les questions portaient aussi bien sur les sites de covoiturages que les magasins bio, et ainsi de suite. Au fond le premier motto non-officiel de l’asso c’est « chacun apprend constamment ».
On s’est lancé dans des actions concrètes, à notre échelle, pour améliorer la situation à Tolbiac. On a commencé par instaurer le tri des déchets. Rien que pour ça il a fallu faire un énorme travail pour dialoguer avec l’administration. On a obtenu l’installation de poubelles fin 2015. Un premier pas ! Une fois qu’elles ont été installées, il a fallu et il faut toujours sensibiliser les étudiants et leur expliquer comment trier. On a inauguré ces poubelles en même temps que notre initiative « Le reflet des marches », pour laquelle on a construit avec l’association La Bulle des pots de fleurs, des assises et tout un tas d’objets urbains grâce auxquels ont a pu verdir les marches à l’extérieur de Tolbiac et rendre la fac plus sympa avec des panneaux de street art. Mais le projet n’est pas encore terminé, on travaille encore dessus.
Cette année notre grand projet c’est d’installer un potager juste à côté du centre Pierre Mendès France. On a obtenu un petit terrain, qui appartient à la fac, sur lequel on essaie de mettre en place un potager participatif. On fait des sessions hebdomadaires de travail, et tout avance peu à peu. On a retourné la terre par exemple. C’est super formateur on apprend beaucoup de choses : comment faire un compost ? Que planter ? A quelle saison ? Comment faire de la permaculture ?
Notre but c’est d’impliquer un maximum d’étudiants. Du coup, on consacre une bonne partie de notre temps à communiquer sur le projet. Ce projet n’est pas « pour l’asso », mais « pour la fac ». Idéalement si on arrive à faire pousser des fruits et des légumes on pourra les cuisiner et partager un repas avec les étudiants ou mettre des fleures dans le fac ! D’ailleurs les habitudes alimentaires des étudiants sont un futur grand sujet : on a lancé un grand questionnaire pour en savoir plus (où achetez-vous votre nourriture, quelles sont vos habitudes, etc.) L’alimentation responsable arrive bientôt !
On a un fonctionnement très ouvert : aucune obligation d‘engagement, tout le monde peut venir proposer un projet et le mener à bien. C’est central dans notre fonctionnement.
On est aussi a-partisans. Cela ne veut pas dire que nous sommes apolitiques, parce que porter des positions écologistes va amener à protester contre un projet comme Notre Dame des Landes par exemple. Mais on n’est affilié à aucun parti. Ça a été une source de débats bien sûr. Il nous a semblé que l’essentiel c’était de rester concentré sur notre cause : l’écologie. Et cet effort, cette volonté de toujours revenir à notre but initial (et final), nous a forcé à réfléchir à toutes nos actions, même les plus banales. Quand il s’est agit de faire des tracts, on s’est à nouveau demandé : quel est notre but ? Est-ce qu’on les fait pour promouvoir l’écologie, ou notre association ?
Plus largement, l’écologie recoupe des enjeux pas seulement environnementaux mais sociaux et économiques donc notre but est aussi de promouvoir un modèle de société durable tant économiquement que socialement, c’est pourquoi on défend d’autres valeurs humanistes ou humanitaires, sociales …
On fait partie du REFEDD (Réseau Français des Etudiants pour le Développement Durable) ; et on participe à leurs rencontres annuelles. C’est l’occasion de nous former, d’apprendre des autres. Mais on n’a pas forcément de vrais liens avec d’autres associations. Nos actions ont dans l’ensemble plutôt été faites avec des associations de Paris I.
Cela dit, on a découvert ELAMP aux dernières rencontres du REFEDD. C’est un site d’économie sociale et solidaire, avec qui on a créé une communauté pour Paris I. Elle permet d’échanger des objets ou des services avec d’autres étudiants. Ça peut être des cours d’anglais contre un DVD… A l’heure actuelle c’est balbutiant. Il faut qu’on communique plus. ELAMP nous aide aussi à ce niveau-là. On a par exemple mis l’accent sur le fait qu’un réseau pareil permet de rencontrer des gens de toutes les filières et âges, ce qui dans une grande fac comme Paris I n’est pas rien ! Mais il faut qu’on continue à le développer.
J’étais sensible aux problématiques environnementales, mais mon militantisme n’allait pas forcément plus loin et n’était pas revendiqué comme tel. C’est au fur et à mesure que mon militantisme s’est renforcé, grâce aux nombreuses discussions en AG, aux débats entre nous autour de l’actualité, et surtout grâce à la multitude de sujets sur lesquels on a travaillé : les modes de vie zéro déchets, le végétarisme/végétalisme, etc. On s’est mobilisés contre Notre Dame des Landes, contre le TAFTA – mais c’est des positions que j’ai développé au sein de l’asso.
J’étais étonnée en arrivant à Paris I de réaliser qu’il n’y avait pas d’association écologiste. J’étais arrivée persuadée de pouvoir m’engager dans une structure préexistante ! Presque sans espoir j’ai placardé des affiches dans la fac, avec mon numéro, en demandant « qui a envie de créer une association écologiste à Paris I ? ». Et j’ai eu plein de réponses ! Bien sûr tous n’ont pas pu s’engager réellement, mais cela montrait qu’il y avait une envie d’engagement latente ! Ça a « bien pris », c’est le moins qu’on puisse dire.
Complètement. Je me suis presque plus formée via l’association que via n’importe quel cours. Je réfléchis à l’enseignement puisque je fais de l’histoire. Qu’est-ce que j’ai appris via mon association ? A m’auto-former. A monter une conférence, à m’ouvrir à des enjeux environnementaux que je ne soupçonnais pas… j’ai consacré plus de temps en L1 à cette association qu’à mes cours ! J’ai peu à peu réfléchi mon avenir par rapport à cette passion, que j’ai largement nourrie grâce à cette asso. C’est là que j’ai remis en question ma manière de consommer, de manger, de penser… bref, tout ! Mais maintenant, place aux nouveaux : je ne suis plus présidente après tout.
Propos recueillis par Camille Bonazzi
Photos : Lunivert Etudiant
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