Avec son petit million d’habitant, Bangui la capitale Centrafricaine est une coquette endormie. Fondée par les français à la fin du XIXe siècle, elle a connu son heure de gloire dans les années 70 pour finalement tomber en ruine aujourd’hui.
Bangui est une ville très calme, à vrai dire, elle a tout d’une ville paradisiaque. Nichée entre le fleuve Oubangui (qui marque la frontière avec la République Démocratique du Congo au sud), et une ceinture de collines, elle s’étend le long de trois grands axes routiers (les seuls goudronnés). A part ces trois routes, les autres axes de communications sont des pistes de latérite, de la terre rouge tantôt poussiéreuse, tantôt pâteuse à la faveur de la pluie. Goudronnés au pas, les routes et le chemin adjacent qui sert de voie piétonne sont complètement défoncés. Malgré un tracé rectiligne, il s’agit de slalomer entre les nids de poules innombrables, qui font ressembler la chaussée à une tranche de gruyère rouillé. Les voies piétonnes sont vallonnées et ressemblent à une mini piste de ski, où il faut négocier les pentes, enjamber les trous et contourner les reliefs. Vue du ciel, la ville ressemble à une comète, stoppée dans sa progression par un fleuve et une colline. Ici, point de mégalopole, d’embouteillages interminables ou de gratte-ciels oppressants. Bangui reste basse et très peu dense : seulement quelques immeubles construits par les libyens dépassent les trois étages. A l’ombre des flamboyants, des marchands ambulants viennent vous vendre des chaussures, des chaises, des serviettes, des mouchoirs. Pour retrouver la bonne société banguissoise, rien de tel que de se rendre au Rock Club, un club de sport avec piscine, courts de tennis et de squash. Il y a même des cours de danse africaine ! Par contre, attention aux termites, libellules et autres insectes qui peuvent vous rejoindre dans la piscine.
L’Oubangui, un affluent du fleuve Congo, rythme par son niveau le cours des saisons. Alors qu’en saison humide c’est un fleuve impétueux et riche en poisson, il laisse affleurer pendant la saison sèche des bancs de sable où les jeunes peuvent faire la fête en soirée. Il sert autant de voie de navigation qu’il permet les baignades. D’ailleurs, à quelques minutes du centre-ville, des paillottes au bord du fleuve vous attendent avec au menu : méchoui au cabri. Tâchez de ne pas écraser les nombreux enfants qui viennent mendier ou qui rebouchent les trous sur la route et tout ira bien. Ils sont tellement nombreux ! Ils mettent un peu de terre sur les nids de poules et des bambous en travers de la route dans l’espoir de quelques francs CFA. D’ailleurs, ils ne parlent pas français (la seule langue qu’on enseigne à l’école, où 10% d’eux vont). A part ces tracasseries de passage, l’endroit est admirable.
L’évasion bucolique vous ennuie ? vous pouvez toujours aller jouer au golf 18 trous. Vous pourrez même participer à des tournois, notamment la coupe américaine, où tout Bangui se réunit. Un professeur est là pour vous apprendre, les caddys sont là pour vous suivre. Ces derniers sont d’ailleurs bien utiles pour disperser les villageois qui sont sur le parcours. Car, petit détail, le terrain est situé en plein milieu de villages, où parfois les vaches passent, les enfants jouent. Etant un des rares endroits propres et dégagés, il est aussi fréquenté par des étudiants studieux et des couples en mal d’intimité. Encore une fois, le personnel du terrain de golf se révèle précieux pour ramasser les préservatifs et éloigner les enfants.
Si vous angoissez à l’idée d’assassiner un badaud à coup de balle de golf, pas d’inquiétude, il vous reste l’aéroclub de Bangui, qui dispose d’un petit avion. Jetez un œil cependant à la jauge de carburant, car les pénuries sont fréquentes, les centrafricains sont blagueurs… Enfin, avant de revenir en France, vous pouvez toujours ramener des diamants (ils sont mondialement célèbres). Attention aux nombreuses arnaques et magouilles, les prisons banguissoises n’ont aucun intérêt touristique.
Rien d’étonnant que le pays ait été la destination favorite des expatriés français, ils s’y sentent tout de suite à l’aise. Ici, les discours de la Françafrique prennent forme. La distribution des boissons est le monopole de la MOCAF (groupe Castel). La vente du sucre est sous le monopole de la SUCAF (groupe Castel également). La distribution de l’eau et le fret, c’est le groupe Bolloré. Evidemment, l’exploration de l’uranium était confiée à AREVA. Tout ceci avec la bénédiction du pouvoir en place qui n’a pas su (ou voulu) gérer ces entreprises après l’indépendance. Il y a même la magnifique place Valérie Giscard D’Estaing, pour rappeler les liens privilégiés qu’entretiennent la France et la République Centrafricaine. Les indiens et les chinois, aussi sont présents, ils distribuent des bourses d’études et ont construit un stade de 20000 places, deux hôpitaux, une école, sans compter les routes et les ponts.
A côté de ce monde magique, il y a celui des idéalistes, celui des ONG. On ne peut pas les manquer : leurs 4×4 circulent à toute vitesse sur les routes défoncées, drapeau au vent, antenne satellite en évidence. Eux ne fréquentent guère le golf, l’aéroclub ou les paillottes. Tout au plus se rendent-ils au Rock Club. Leur situation est précaire : des colocations à 7 dans des villas sans groupe électrogène, sans eau chaude (ou bien sans eau tout court). Mais ils peuvent aussi profiter des pool party dans les villas immenses du personnel des Nations Unies. Finalement, on peut rencontrer des expats qui aiment plus l’Afrique et ses habitants que des professionnels de l’humanitaire, qui n’ont pas toujours choisi de venir ici.
Mais la nuit venue, tout le monde se retrouve au Songo Night, la boîte de nuit de la ville. Entre 22h et 1h, c’est le créneau des militaires. Ils envahissent les lieux, les bras remplis de belles et entreprenantes autochtones qui sauront calmer les frustrations de la semaine. Après 1h, c’est au tour des ONG/expats/Coopérants. Même s’ils sont plus discrets, ils ne font pas forcément différemment.
Et les centrafricains ? Alors qu’en Asie le développement économique et le confort matériel n’a pas permis de délier les langues, la conscience politique est ici très développée. Avec souvent beaucoup de recul, d’humour (noir, évidemment) et de cynisme. Mais un mot d’ordre : Dignité. Ainsi, la compagnie de danse « action culturelle sans frontière » d’Aimé Césaire (de son prénom) organise des spectacles de Danse, le centre Linga Tere (dirigé par Vincent Mabachaka), abrite une radio associative, un restaurant et anime tous les mois des « renkart culturel », avec danses, contes traditionnels et concerts. Preuve que dans un des pays les plus pauvres et les plus sinistrés, il y a toujours une bière à boire à l’ombre du stade, de la musique pour danser entre deux coupures d’électricité, et le rêve d’un avenir plein de promesses tenues.
Finalement, si pas mal de Banguissois rêvent encore de l’éclat des éléphants blancs à l’époque de Bokassa, le pays n’est pas devenu la Suisse de l’Afrique, mais un véritable far west du nowhere où tout est possible : le meilleur et le pire.
Le moment pour se ramener
En Hiver. A la sortie de la saison des pluies, où la latérite gorgée d’eau se durcit et où le soleil n’est pas encore impitoyable. Venez profitez des « Kermesses » : ces foires faites de tôles, de toiles du HCR et de sono saturées où on vient prendre une Mocaf entre ami, danser sur la musique rythmée et manger un yabanda. La saison sèche vous permet aussi de voyager sans trop de mal dans le sud ouest du pays, afin de d’aller voir des gorilles, éléphants dans la forêt équatoriale.
Où sortir en mode crevard
Le stade 20000 places. Construit par les chinois, ce stade en béton accueille surtout derrière les gradins un superbe spot où viennent se nicher des bars. De la bière, du poulet grillé et de la musique, le tout pas trop cher.
Un lieu de BG
Le Ledger plaza. C’estle lieu le plus chic de la ville. Imaginez vous donc : un hôtel 5 étoiles au milieu de la ville. Construit par des ouvriers (ou prisonniers ?) de Kadhafi, ce dernier n’aura finalement jamais pu venir à l’inauguration. Venez donc profiter d’un buffet à volonté copieux, d’une piscine avec son bar, du centre de conférence et de la salle de sport. Tout est climatisé et approvisionné en eau, grâce à un groupe électrogène et un puit indépendants. Grâce au Ledger, Bangui pourrait devenir un haut lieu de villégiature.
Made in Bangui
Mocaf. C’est la bière locale. Acronyme de « Motte Cordonnier Afrique », cette brasserie appartient au groupe français Castel. Sa brasserie est un des employeurs les plus importants du pays. Si les gens n’ont pas forcément assez d’argent pour se payer plus d’un repas par jour, ils en auront toujours assez pour boire 2, 4, 6 Mocaf entre amis dans un maquis. C’est une bière légère, sans particularité. D’aucun disent même qu’elle est fade et sans intérêt. Mais elle est ce totem qui permet de ressusciter les meilleurs moments. Comme quoi, même dans les pires conditions peuvent se trouver les plus beaux souvenirs.
Bangui city maker
François Bozizé Yangouvonda. Le président. Dans un régime « de prédation », tout se fait en fonction des liens avec les proches du pouvoir. Du policier qui veut faire payer une amende pour « usage de bitume » aux entreprises obligées de payer les fêtes du président, chacun doit se reposer aux connaissances ou rapport de force au pouvoir. Entre volontarisme politique et dictature, la limite est parfois ténue. Mais Bozizé semble avoir fait un choix clair, et il ne semble pas exister d’alternatives à sa personne.
Note : Les photos sont interdites à Bangui et peuvent coûter quelques heures de garde à vue…
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